L'odyssée judiciaire d'un médecin-chef catholique licencié après s'être remarié a pris fin - ou pas ? BAG, jugement du 20.02.2019 - 2 AZR 746/14
Cette décision du BAG est le résultat d'un litige qui a duré des années. Le cas avait déjà occupé toutes les instances imaginables au niveau national et européen : Après que le médecin se soit défendu avec succès contre son licenciement devant le tribunal du travail de Düsseldorf (jugement du 30.7.2009, Az. : 6 Ca 2377/09), le tribunal régional du travail de Düsseldorf (jugement du 1.7.2010, Az. : 5 Sa 996/10) et le tribunal fédéral du travail d'Erfurt (jugement du 8.9.2011, Az. : 2 AZR 543/10), l'Église a fait appel à la Cour constitutionnelle fédérale et a obtenu gain de cause (jugement du 22.10.2014, 2 BvR 661/12). La Cour constitutionnelle fédérale a considéré que le droit à l'autodétermination des Églises avait été violé et a annulé la décision du BAG. Le BAG devait statuer à nouveau selon les directives de la Cour constitutionnelle, tout en respectant le droit à l'autodétermination des Eglises. Les juges suprêmes du travail n'ont toutefois pas voulu se contenter des directives de Karlsruhe et ont demandé à la CJCE de clarifier si une telle action ne violait pas l'interdiction de discrimination prévue par le droit de l'Union et n'était pas contraire aux directives anti-discrimination correspondantes de l'UE. Dans leur décision, les juges luxembourgeois de la CJCE ont clairement indiqué que les exigences ecclésiastiques en matière de comportement loyal au sens de l'éthique susmentionnée ne justifiaient une différence de traitement entre les employés que si elles constituaient, dans le cas concret, "une exigence professionnelle qui, compte tenu de l'éthique de l'église ou de l'organisation en question, est essentielle, légitime et justifiée et qui respecte le principe de proportionnalité". Sans surprise, le BAG s'est rallié à ce point de vue dans sa décision et a donné raison au plaignant. Le licenciement est nul.
Le litige est-il donc définitivement clos ? Seulement si l'Eglise ne fait pas appel de la nouvelle décision du BAG auprès de la Cour constitutionnelle fédérale. Si la Cour constitutionnelle devait effectivement se pencher à nouveau sur l'affaire, le résultat est ouvert. Les juges constitutionnels devront alors décider s'ils accordent la priorité au rôle particulier de l'Église, inscrit dans la Loi fondamentale, par rapport au droit de l'Union. En théorie, cela serait envisageable. Mais une telle décision de la Cour constitutionnelle aurait des conséquences allant bien au-delà du cas actuel : Jusqu'à présent, en Allemagne, c'est le droit de l'Union qui prime, la CJUE appliquant le droit de l'Union en priorité "avant toute norme nationale". La Cour constitutionnelle a suivi cette voie jusqu'à présent, car le droit européen garantit une protection des droits fondamentaux comparable au niveau allemand. Si la Cour constitutionnelle en décidait autrement, elle refuserait à l'Union une protection des droits fondamentaux comparable.
Conséquences pour le droit du travail de l'Église : la décision représente une atteinte sensible à la grande autonomie dont jouissait jusqu'à présent l'Église en matière de personnel. Les prescriptions de la CJCE en matière de droit de la discrimination, auxquelles le BAG vient de se rallier, vont très loin. Ainsi, à l'avenir, les manquements au droit du travail selon l'ordre fondamental de l'Église (comme l'adultère ou le partenariat de vie enregistré) ne pourront probablement plus être conciliés avec les prescriptions du droit de la discrimination. En outre, les Églises devront accepter que les tribunaux d'État décident si, pour une activité donnée, les directives de l'Église constituent une "exigence professionnelle essentielle, légitime et justifiée".